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d. Réunions publiques, manifestations, rassemblement

Loi n° 69-4 du 24 janvier 1969, réglementant les réunions publiques, cortèges, défilés, manifestations et attroupements

Au nom du Peuple,

Nous, Habib Bourguiba, Président de la République Tunisienne,

L’Assemblée nationale ayant adopté,

Promulguons la loi dont la teneur suit :

Chapitre Premier – Les réunions publiques

Article premier – Les réunions publiques sont libres. Elles peuvent avoir lieu sans autorisation préalable sous les conditions prescrites par la présente loi.

Art. 2 Toute réunion publique sera précédée d’une déclaration indiquant le jour et l’heure de son déroulement. Toutefois, les réunions électorales sont régies par des règlements spéciaux édictés en matière électorale.

La déclaration sera signée par deux personnes au moins jouissant de leurs droits civils et domiciliées dans la circonscription ou la réunion doit avoir lieu.

Les deux signataires de la déclaration devront faire mention de leur identité complète, de leur qualité et de leur adresse.

La déclaration sera remise au siège du Gouvernorat ou de la Délégation contre un récépissé où seront indiquées la date et l’heure de son dépôt qui doit avoir lieu trois jours au minimum et quinze jours au maximum avant la date de la réunion.

À Tunis, la déclaration sera remise dans les délais indiqués à la Direction de la Sûreté nationale qui en délivrera ledit récépissé.

Art. 3 – La déclaration doit indiquer le but et le motif de la réunion.

Art. 4 – Les réunions ne peuvent se prolonger au-delà de minuit. Cependant dans les localités où la fermeture des établissements publics a lieu plus tard, elles pourront se prolonger jusqu’à l’heure fixée pour la fermeture de ces établissements.

Art. 5 – Chaque réunion doit avoir un bureau responsable de trois personnes au moins. Ce bureau est chargé de maintenir l’ordre, d’empêcher toute infraction aux lois, de conserver à la réunion le caractère qui lui a été donné par la déclaration, d’interdire tout discours contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs, ou contenant provocation à un acte qualifié, crime ou délit.

À défaut de désignation par les signataires de la déclaration de tous les membres du bureau responsable, et en cas d’absence, par suite d’empêchement, de ceux désignés, les membres du bureau seront élus par les membres de l’assemblée.

Art. 6 – Un fonctionnaire sera chargé par les services de la Sûreté pour assister à la réunion publique. Ce fonctionnaire a le droit de prononcer la dissolution de la réunion :

  1. s’il en est requis par le bureau responsable de la réunion.
  2. s’il se produit des collisions ou voies de fait.

Les personnes réunies sont tenues de se séparer au premier ordre qui leur sera adressé.

Art. 7 – Les autorités responsables peuvent interdire par arrêté toute réunion susceptible de troubler la sécurité et l’ordre publics. La notification de cet arrêté sera faite aux organisateurs de la réunion par les agents de la Sûreté.

Dans un tel cas, les organisateurs peuvent en appeler au Secrétaire d’État à l’Intérieur qui statuera en dernier ressort.

Art. 8 – Les réunions ne peuvent être tenues sur la voie publique.

Chapitre II – Cortèges, défilés et manifestations sur la voie publique

Art. 9 – Sont soumis obligatoirement à la déclaration préalable tous cortèges, défilés, et d’une façon générale, toute manifestation sur la voie publique, quel qu’en soit le caractère.

Art. 10 – La déclaration se fait conformément aux prescriptions de l’article 2 de la présente loi. Elle doit indiquer les lieux de rassemblement et l’itinéraire, ainsi que les banderoles ou les drapeaux qui seraient portés.

Art. 11 – Les cortèges, défilés et manifestations armés sont interdits et sont considérés comme attroupement sur la voie publique. Les participants seront traités conformément aux dispositions des articles de la présente loi, concernant les participants aux attroupements.

Art. 12 – Les autorités responsables peuvent interdire par arrêté toute manifestation susceptible de troubler la sécurité et l’ordre publics.

Notification sera faite aux organisateurs de la manifestation par les agents de la Sûreté.

Chapitre III – Attroupement sur la voie publique

Art. 13 – Sont interdits sur les voies et places publiques :

  1. tout attroupement armé.
  2. tout attroupement non armé susceptible de troubler la tranquillité publique.

Art. 14 – L’attroupement est considéré armé :

  1. quand l’un de ses participants est porteur d’une arme apparente.
  2. quand certain de ses participants sont porteurs d’armes ou engins divers apparents ou cachés ayant déjà été comme armés ou qui ont été procurés pour servir comme telles.

Art. 15 – L’attroupement sera dispersé manu militari par les forces de police, après que le représentant de l’autorité qualifiée, ayant la qualité d’Officier de police judiciaire, revêtu de son uniforme règlementaire ou porteur de l’insigne de ses fonctions :

  1. aura annoncé sa présence au moyen d’un signal audible ou lumineux de nature à prévenir efficacement les participants à l’attroupement.
  2. aura fait sommation à ces derniers de se disperser au moyen d’un porte-voix, d’un signal audible ou lumineux de nature a les biens avertir.
  3. aura fait une deuxième sommation selon le même procédé, si la première était demeurée sans résultat.

Art. 16 – Le représentant de l’autorité qualifié, visé à l’article 15 de la présente loi, annonce sa présence :

  1. en faisant entendre par porte-voix les mots suivants : « Obéissez à la loi – Dispersez-vous ».
  2. en utilisant une lumière rouge discontinue ou en faisant agiter cette lumière dans la main tenue haute, par des mouvements tournants.

Art. 17 – La première sommation de dispersion sera faite par l’un des signaux audibles ou lumineux suivants :

  1. proclamation par porte-voix des mots : « Premier avertissement – Dispersez-vous ou il va être fait usage de la force ».
  2. utilisation d’une lumière rouge discontinue ou en faisant agiter cette lumière, dans la main tenue haute, par des mouvements tournants.

Art. 18 – La deuxième et dernière sommation de dispersion sera faite par l’un des signaux audibles ou lumineux suivants :

  1. proclamation par porte-voix de mots : « Dernière sommation – Dispersez-vous ou il va être fait usage de la Force ».
  2. utilisation d’une lumière rouge discontinue ou en faisant agiter cette lumière dans la main tenue haute, par des mouvements tournants.

Art. 19 – Au cas où la dispersion de l’attroupement par la force nécessiterait l’usage des armes, la deuxième sommation de dispersion devra être répétée deux fois au moyen de l’un des signaux audibles ou lumineux susvisés.

Chapitre IV – Usage des armes

Art. 20 – Les agents de la Sûreté ne peuvent recourir à l’emploi des armes hors les cas de légitime défense prévus par les articles 39, 40 et 42 du Code pénal que dans les circonstances exceptionnelles suivantes :

  1. lorsqu’ils ne peuvent assumer autrement la défense des lieux qu’ils occupent, des édifices qu’ils protègent, des postes et des personnes dont ils ont été chargés de la garde ou si la résistance ne pouvant être réduite par aucun moyen autre que l’usage des armes.
  2. lorsqu’ils somment vainement un individu suspect de s’arrêter par des ordres répétés à haute-voix « Halte ! Police », que cet individu n’obtempère pas et tente de fuir et qu’il n’existe plus de moyens de le forcer à s’arrêter autres que l’usage des armes.
  3. lorsqu’ils font signe à un véhicule, à une embarcation où à tout autre moyen de transport de s’arrêter, que son conducteur ne s’exécute pas et qu’il n’existe plus de moyens de le forcer à s’arrêter autres que l’usage des armes.

Art. 21 – Au cas où les agents de la Sûreté se trouveraient en présence de manifestants qui refusent de se disperser malgré les avertissements qui leur sont adressés et qui sont énoncés dans les articles précédents de la présente loi, ils emploieront progressivement pour les disperser, les moyens suivants :

  1. arrosage d’eau ou charge à coups de bâton ;
  2. jets de bombes lacrymogènes ;
  3. tir à feu vertical en l’air pour faire peur aux manifestants ;
  4. tir à feu par-dessus leur tête ;
  5. tir à feu en direction de leurs jambes.

Art. 22 – Au cas où les manifestants tentent d’atteindre leur but par la force malgré l’utilisation de tous les moyens énoncés à l’article 21, pour les faire disperser, les agents de la Sûreté tireront directement sur eux.

Chapitre V – Dispositions pénales

Art. 23 – Les infractions aux dispositions des articles 2 et 5 de la présente loi sont punies de seize jours à trois mois de prison, sans préjudice des poursuites pour crimes ou délits qui pourraient être commis au cours de la réunion.

Sont responsables de ces infractions les membres du bureau de la réunion, ou à défaut, les signataires de la déclaration ou à défaut de celle-ci, les organisateurs de la réunion.

Sont passibles des mêmes peines les individus qui refusent de se disperser après dissolution de la réunion.



Art. 24 – Sont punis d’une amende de 10 à 200 dinars et d’un mois à deux ans de prison, les individus qui auront tenu une réunion interdite conformément aux dispositions de l’article 7 de la présente loi. Sont passibles des mêmes peines, les individus qui auront mis un local à la disposition des organisateurs pour y tenir une réunion sans s’être assurés que la déclaration de cette réunion avait été faite conformément à la loi.

En cas de récidive, les peines seront doublées et une interdiction de séjour de cinq ans an minimum et dix ans au maximum, peut être prononcée.

Art. 25 – Est passible d’une peine de quinze jours à six mois de prison et d’une amende de 10 à 300 dinars, ou de l’une de ces deux peines seulement, tout individu qui aura pris une part active à une réunion tenue sur la voie publique.

Toute provocation directe à la tenue d’une réunion sur la voie publique sera punie des mêmes peines qu’elle ait été suivie ou non d’effet.

Art. 26 – Sont passibles d’une amende de 12 à 120 dinars et de trois mois à un an de prison tous ceux :

  1. Qui auront fait une déclaration incomplète, ou inexacte et de, nature à tromper sur les circonstances dans lesquelles aura lieu la réunion où se déroulera la manifestation où qui auront adresse d’une manière, quelconque des invitations à participer la réunion avant le dépôt de la déclaration ou après son interdiction.
  2. Qui aura participé à une manifestation qui n’a pas fait l’objet d’une déclaration ou qui aura été interdite. En cas de récidive, il est fait application du paragraphe 2 de l’article 24.

Art. 27 – Est passible d’une peine de six mois à deux ans de prison et d’une amende de 24 à 240 dinars ou de l’une de ces deux peines seulement, tout individu qui aura participé à une manifestation hostile sur la voie publique ou dans des lieux publics.

Est considéré hostile, toute manifestation qui se déroule avec des cris, des chants, des insignes, des emblèmes ou des affiches collées ou non, qui incitent aux actes prévus et punis par les articles de 60 à 80 du Code pénal.

Art. 28 – Est passible d’une peine de six mois à deux ans de prison et d’une amende de 24 à 240 dinars, sans préjudice, le cas échéant, de peines plus sévères qui répriment l’attroupement, tout individu trouve porteur d’une arme apparente ou cachée ou d’un engin dangereux pour la sécurité publique au cours ou à l’occasion du déroulement d’une manifestation, d’un cortège ou d’un rassemblement sur la voie publique ou d’une réunion.

En cas de récidive, il sera fait application des dispositions du paragraphe 2 de l’article 24.

Art. 29 – Est passible d’une peine d’un mois a un an de prison, tout individu non armé qui, participant à une manifestation armée ou non, ne se serait pas retiré après la première sommation. La peine sera de six mois à trois ans de prison si l’individu non armé persiste dans sa participation à une manifestation non armée et dont la dispersion aura nécessité l’emploi de la force.

Les individus condamnés en application des dispositions du présent article, peuvent être prives, pendant un an au moins et cinq ans au plus, de certaines ou de tous les droits énoncés au paragraphe 6 de l’article 5 du Code pénal.

Art. 30 – Sans préjudice des peines plus sévères, le cas échéant, sera puni de six mois à cinq ans de prison, tout individu trouve dans une manifestation, porteur d’une arme apparente ou cachée ou d’un engin de quelque nature que ce soit, apparent ou caché, qu’il a employé comme arme ou qu’il se serait procuré pour servir comme telle. La peine sera d’un an à dix ans de prison dans le cas où la manifestation aura été dispersée par la force.

Les individus condamnés en application du présent article, peuvent être également condamnés à l’interdiction de séjour et à la privation, pendant cinq ans au moins et dix ans au plus, des droits énoncés au paragraphe 6 de l’article 5 du Code pénal.

Art. 31 – Toute provocation directe a un attroupement non armé, soit par discours tenus publiquement, soit par écrits, soit par des imprimés affichés ou distribués, est punie d’un mois à un an de prison, si elle a été suivie d’effet. Dans le cas contraire, la peine sera d’un à trois mois de prison.

Toute provocation directe par les mêmes voies a un attroupement armé, sera punie de six mois à deux ans de prison si elle a été suivie d’effets. Dans le cas contraire, elle sera punie d’un à six mois de prison.

Art. 32 – Les poursuites pour les délits concernant les attroupements ne font pas obstacle aux poursuites pour les crimes et les délits commis individuellement au cours de l’attroupement.

Tout individu qui persiste dans sa participation à un attroupement après la deuxième sommation faite par le représentant des autorités publiques sera condamné à la réparation des dommages causés par cet attroupement.

Art. 33 – Les dispositions de l’article 53 du Code pénal ne s’appliquent pas aux infractions prévues par la présente loi.

Art. 34 – Sont abrogées toutes dispositions antérieures contraires à la présente loi et notamment le décret du 5 avril 1905, relatif aux manifestations sur la voie publique, le décret du 26 mai 1936 organisant les cortèges, les manifestations et les attroupements sur la voie publique et le décret du 6 août 1936, relatif aux réunions publiques.

La présente loi sera publiée au Journal officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l’État.

Fait à Carthage, le 24 janvier 1969.

Type du texte:Loi
Numéro du texte:04
Date du texte:1969-01-24
Ministère/ Organisme:Ministère de l'intérieur
Statut du texte:en vigueur
N° JORT:04
Date du JORT:1969-01-28
Page du JORT:117 - 119

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