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Partie XI - Lutte contre la corruption

Décret gouvernemental n° 2016-498 du 8 avril 2016, fixant des conditions et des procédures d’exclusion de la participation aux marchés publics

Le chef du gouvernement,

Sur proposition du ministre de la fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption,

Vu la constitution,

Vu la loi n° 2008-16 du 25 février 2008, portant approbation de la convention des nations unies de lutte contre la corruption,

Vu le décret-loi cadre n° 2011-120 du 14 novembre 2011, relatif à la lutte contre la corruption,

Vu le décret n° 2013-5096 du 22 novembre 2013, relatif à la création de la haute instance de la commande publique et fixant le statut particulier des membres du corps des contrôleurs et réviseurs de la commande publique relevant de la Présidence du gouvernement,

Vu le décret n° 2014-1039 du 13 mars 2014, portant réglementation des marchés publics et notamment son article 177,

Vu le décret Présidentiel n° 2015-35 du 6 février 2015, portant nomination du chef du gouvernement et de ses membres,

Vu le décret Présidentiel n° 2016-1 du 12 janvier 2016, portant nomination des membres du gouvernement,

Vu l’avis de la haute instance de la commande publique,

Vu l’avis de l’instance nationale de lutte contre la corruption,

Vu l’avis du conseil de la concurrence,

Vu l’avis du tribunal administratif.

Prend le décret gouvernemental dont la teneur suit :

Section première – Dispositions générales

Article premier – Est soumis aux dispositions du présent décret gouvernemental, tout opérateur économique remplissant les conditions de participation aux marchés publics avéré avoir commis des actes ou agissements portant atteinte à l’intégrité au sens de l’article 13 du présent décret gouvernemental. Est considéré opérateur économique, toute personne morale ou physique, qui exerce une activité économique en vue de satisfaire des commandes publiques.

Art. 2 – L’opérateur économique demeure responsable des actes ou agissements portant atteinte à l’intégrité au sens de l’article 13 du présent décret gouvernemental, qui sont accomplis par des personnes ayant des liens avec lui et avoir commis soit dans le cadre de l’exercice de leurs missions ou au nom dudit opérateur ou que ce soit avec son consentement ou à sa connaissance ou dont il est supposé en avoir pris connaissance ou suite à son approbation.

L’acceptation de l’opérateur économique du privilège ou du profit qui s’ensuit être la conséquence de ces actes ou agissements est considérée comme étant la preuve de sa connaissance, de son consentement ou de son approbation.

Art. 3 – La décision d’exclusion prise contre tout opérateur économique participant à un marché public dans le cadre d’un groupement s’étend à l’ensemble de ses membres lorsqu’il s’avère que les actes établissant l’exclusion sont commis au profit du groupement, ou en son nom ou en connaissance de ses membres, ou avec leur approbation ou leur consentement.

La décision d’exclusion prise contre une société appartenant à un groupement de sociétés s’étend aux autres sociétés du groupement s’il s’avère que les actes et agissements motifs de l’exclusion ont été commis en complicité des membres du groupement, en leur nom, en leur connaissance, avec leur approbation ou leur consentement.

L’acceptation par les membres du groupement ou du groupement de sociétés du privilège ou du profit résultant de ces actes ou agissements est considérée comme étant la preuve de leur connaissance, de leur approbation ou de leur consentement.

La décision d’exclusion s’étend à tout opérateur économique créé en vue de se soustraire de l’application des dispositions du présent décret gouvernemental.

Les dispositions du paragraphe précédente ‘appliquent aux sociétés créées dans le cadre des procédures de fusion et de scission des sociétés.

Il est procédé à une enquête sur l’interférence de l’opérateur économique créé par rapport à celui qui est concerné par la décision d’exclusion

Art. 4 – Est considérée exclusion définitive au sens du présent décret gouvernemental, la décision d’écarter l’opérateur économique de la participation aux marchés publics pour une période maximale de dix (10) ans.

Art. 5 – L’exclusion temporaire est une mesure préventive. Elle est prise avant l’achèvement des travaux d’enquête et d’instruction lorsque l’établissement des preuves sont jugés suffisantes et confirment que l’opérateur économique a commis des actes et agissements portant atteinte à l’intégrité.

Section II – De la commission d’exclusion des opérateurs économiques de la participation aux marchés publics

Art. 6 – Est créée auprès de la haute instance de la commande publique une commission dénommée « commission d’exclusion des opérateurs économiques de la participation aux marchés publics » ci-après citée « la commission », chargée de statuer sur l’exclusion des opérateurs économiques de la participation aux marchés publics.

Art. 7 – La commission est composée comme suit :

  • un représentant du ministre chargé de la fonction publique et de la gouvernance et de la lutte contre la corruption : président,
  • un magistrat du 3ème grade relevant du corps judiciaire : membre,
  • un magistrat administratif au rang de conseiller au tribunal administratif : membre,
  • un représentant du ministre chargé des affaires étrangères : membre,
  • un représentant du ministre chargé de l’intérieur : membre,
  • un représentant du ministre chargé des finances : membre,
  • un représentant du ministre chargé de l’équipement : membre,
  • un représentant du ministre chargé du commerce : membre,
  • un représentant du ministre chargé de l’industrie : membre,
  • un représentant du ministre chargé des technologies de la communication et de l’économie numérique : membre,
  • un représentant du conseil de la concurrence : membre,
  • deux (2) représentants de la profession concernée : membres,

Les membres de la commission sont nommés par arrêté du chef du gouvernement sur proposition des ministères et organismes concernés.

Art. 8 – La commission peut , à la demande de son président, de l’un de ses membres ou d’un membre relevant du corps des contrôleurs et réviseurs de la commande publique en charge des missions d’enquête, consulter toute personne ayant compétence ou se faire assister par des experts.

Art. 9 – La commission ne se réunit qu’en présence des deux tiers, au moins, de ses membres dont obligatoirement le président. Elle prend ses décisions à la majorité de ses membres.

Le président de la commission peut, en cas d’empêchement justifié, déléguer la présidence des travaux de la commission à l’un de ses membres.

Si le quorum n’est pas atteint, la commission se réunit à la majorité de ses membres dès que possible à une date que fixe le président de la commission ou son suppléant. Elle prend ses décisions à la majorité des membres présents.

Art. 10 – Les membres relevant du corps des contrôleurs et réviseurs de la commande publique sont chargés des missions d’enquête et d’instruction se rapportant aux travaux de la commission.

Les membres relevant du corps des contrôleurs et réviseurs de la commande publique chargés des missions d’enquête et d’instruction sont désignés dans le présent décret gouvernemental par le terme « les contrôleurs ».

Art. 11 – Il est octroyé aux membres de la commission et aux contrôleurs dans le cadre des missions qui leurs sont confiées en vertu du présent décret gouvernemental, les pouvoirs d’enquête et d’investigation. Ils disposent à cet effet du droit d’accès aux documents et données.

Art. 12 – Tout membre de la commission ou contrôleur ayant des intérêts ou des liens avec l’opérateur économique qui sont susceptibles de compromettre son indépendance, est tenu de les signaler au président de la commission.

Il doit s’abstenir de participer aux travaux de la commission.

Section III – Des procédures d’exclusion

Art. 13 – Est exclu de la participation aux marchés publics, tout opérateur économique dans les cas suivants :

  • ayant été prouvé qu’il a commis des actes ou agissements portant atteinte à l’intégrité professionnelle,
  • ayant fait l’objet d’une décision juridictionnelle définitive attestant qu’il a eu recours à des pratiques anticoncurrentielles se rapportant à la participation aux marchés publics,
  • ayant fait intentionnellement usage de fausses déclarations ou falsifié des documents ou ayant commis tout autre acte visant à induire l’acheteur public en erreur dans l’évaluation de ses capacités financières, professionnelles ou techniques lors de la participation aux marchés publics,
  • ayant failli sciemment à ses obligations contractuelles par le recours à des actes ou agissements contraires à l’intégrité lors de l’exécution d’un marché.

Art. 14 – Toute structure publique , instance ou corps d’investigation , de contrôle , d’inspection et d’audit ainsi que toute personne disposant d’informations sur l’implication d’un opérateur économique dans des pratiques pouvant être qualifiées en tant que motifs d’exclusion au sens du présent décret gouvernemental, doit transmettre ces informations à la commission.

Art. 15 – La commission se saisit des procédures d’exclusion soit d’office, soit sur la base des données qui lui sont parvenues.

Art. 16 – La commission prend toutes les mesures nécessaires à la protection de la confidentialité de l’identité de la source des informations qui lui sont parvenues.

Art. 17 – Dès la réception d’informations sur l’implication d’un opérateur économique dans des pratiques pouvant être qualifiées en tant que motifs d’exclusion au sens du présent décret gouvernemental, le président de la commission désigne un membre parmi les contrôleurs qui se charge des missions d’enquête et d’instruction, de l’étude des données et de la vérification du caractère sérieux de celles-ci.

Art. 18 – Le contrôleur est tenu, dès sa nomination, de procéder à ce qui suit :

  • notifier à l’opérateur économique, par lettre recommandée ou par tout autre moyen laissant une trace écrite, la réception par la commission d’informations relatives à son implication dans des pratiques pouvant être qualifiées en tant que motifs d’exclusion et le déclenchement des procédures d’enquête et d’instruction à cet effet,
  • inviter l’opérateur économique à présenter par lui-même ou par son représentant sa réponse écrite dans un délai maximum de trente (30) jours, à compter de la date de réception de la notification,
  • inviter l’acheteur ou les acheteurs publics concernés, à travers le ministre de tutelle, à émettre leurs avis et observations dans un délai maximum de vingt (20) jours, à compter de la date de correspondance.

Durant les travaux d’enquête et d’instruction et en cas d’établissement des preuves suffisantes qui confirment que l’opérateur économique a commis des actes et agissements portant atteinte à l’intégrité, le contrôleur peut proposer à la commission d’exclure temporairement l’opérateur économique jusqu’à l’achèvement des procédures en question.

La commission prend la décision d’exclusion temporaire, en informe l’opérateur économique et la publie selon les mêmes procédures de l’exclusion définitive.

Art. 19 – Le contrôleur clôture ses travaux et transmet au président de la commission une note détaillée accompagnée des justificatifs dont il a pris possession lors de l’étape d’enquête et d’instruction et qui comprend les conclusions auxquels il est parvenu, son avis et sa proposition concernant l’exclusion, et ce, dans un délai maximum de vingt (20) jours, à compter de l’expiration du délai mentionné au 2ème tiret de l’article 18 du présent décret gouvernemental.

Art. 20 – Dans un délai maximum de vingt (20) jours, à compter de la date de réception de la note détaillée, la commission prend l’une des mesures suivantes :

  • le classement du dossier,
  • l’exclusion définitive.
  • Dans la prise de décision, la commission s’appuie sur les données contenues dans le dossier et prend en considération, notamment, les éléments suivants concernant l’opérateur économique :
  • l’existence d’un manuel, de critères de gestion et d’un système de contrôle interne effectif,
  • la notification aux acheteurs publics avec lesquels il a affaire ou à la commission, des actes qui lui sont attribués en temps opportun,
  • l’audit par l’opérateur économique des circonstances ayant accompagné les actes qui lui sont attribués et la transmission des résultats de l’audit aux acheteurs publics ou à la commission,
  • la coopération par l’opérateur économique lors de l’enquête et l’instruction au sujet des actes qui lui sont attribués,
  • l’acquittement par l’opérateur économique, de toute somme dont il est redevable et qui résulte des actes qui lui sont attribués,
  • la prise de mesures disciplinaires à l’encontre des personnes responsables des actes à l’origine de l’exclusion,
  • la prise de mesures correctives,
  • la mise en place de nouvelles procédures de contrôle et de formation.

Art. 21 – La commission peut le cas échéant sursoir sa décision au sujet du dossier et ordonner la poursuite des travaux d’enquête et d’instruction.

Art. 22 – La durée de l’exclusion définitive doit être appropriée à la gravité des actes et agissements commis et ne doit pas excéder dans tous les cas dix (10) ans.

Art. 23 – La durée de l’exclusion temporaire est prise en considération dans le calcul de la durée de l’exclusion définitive.

Art. 24 – La commission peut réviser la décision d’exclusion soit en baissant sa durée soit en la retirant et ce, suite à une demande justifiée de l’opérateur économique, en s’appuyant sur les éléments suivants :

  • l’apparition de nouvelles preuves,
  • l’annulation du jugement juridictionnel ayant fondé l’exclusion,
  • le changement effectif des dirigeants,
  • la prise de mesures effectives et nécessaires pour traiter les circonstances ayant abouti à l’exclusion.

Art. 25 – La commission est tenue de notifier sa décision à l’opérateur économique par lettre recommandée ou par tout autre moyen laissant une trace écrite et ce, dans un délai de sept (7), jours à compter de la date de prise de cette décision.

Art. 26 – La décision d’exclusion comporte obligatoirement les mentions suivantes :

  • le rappel de la date d’ouverture des procédures d’enquête et d’instruction,
  • la détermination des motifs d’exclusion,
  • la précision de la durée de l’exclusion en mentionnant les dates de début et de fin de celle-ci.

Section VI – Des effets de l’exclusion

Art. 27 – La décision d’exclusion produit à l’encontre de l’opérateur économique les effets suivants tout au long de la période d’exclusion :

  • son inscription sur la liste des opérateurs économiques interdits de la participation aux marchés publics,
  • l’interdiction de participer aux marchés publics à titre individuel ou dans le cadre d’un groupement,
  • l’interdiction d’avoir des contrats de sous-traitance dans le cadre de marchés publics,
  • l’interdiction de participer à des commandes dont le montant est inférieure aux seuils exigés de passation des marchés publics.

Art. 28 – Tout acheteur public est tenu de consulter la liste des opérateurs économiques interdits de la participation aux marchés publics, et ce :

  • après l’ouverture des plis,
  • avant la présentation du dossier d’évaluation des offres à la commission de marchés compétente,
  • juste avant l’attribution du marché,
  • préalablement à la présentation d’un projet de contrat de marché négocié.

Art. 29 – Sans préjudice des dispositions des articles 177 et 179 du décret n° 2014-1039 du 13 mars 2014, portant réglementation des marchés publics, il est obligatoire de poursuivre l’exécution des marchés conclus avant inscription de l’opérateur économique à la liste des opérateurs économiques interdits de la participation aux marchés publics.

Section V – Du système de gestion de la base de données de l’exclusion

Art. 30 – L’observatoire national des marchés publics créé au sein de la haute instance de la commande publique tient un système d’information permettant notamment de :

  • inscrire les opérateurs économiques sur la liste des opérateurs interdits de la participation aux marchés publics et de les retirer,
  • publier la liste des opérateurs économiques interdits de la participation aux marchés publics,
  • mettre à jour la liste des opérateurs économiques interdits de la participation aux marchés publics.

Art. 31 – Le système d’information fournit au moins les renseignements suivants :

  • le nom, l’adresse ou la raison sociale et le siège social de l’opérateur économique exclu,
  • le prénom, le nom, le numéro de la carte d’identité et l’adresse du dirigeant,
  • le matricule fiscal,
  • le numéro du registre commercial,
  • la nature de l’exclusion qu’elle soit temporaire ou définitive,
  • le motif de l’exclusion,
  • la durée de l’exclusion,
  • les dates de début et de fin de l’exclusion.

Art. 32 – L’observatoire national des marchés publics créé au sein de la haute instance de la commande publique gère le système d’information et effectue notamment les tâches suivantes :

  • l’insertion des données mentionnées à l’article précédant au plus tard à la date d’entrée en vigueur de l’exclusion,
  • la mise à jour des données relatives à l’exclusion dans un délai maximum de trois (3) jours, à compter de la date de notification du changement.

Art. 33 – La commission doit transmettre à l’observatoire national des marchés publics, par lettre recommandée ou par tout autre moyen laissant une trace écrite, sa décision accompagnée d’une fiche comportant les données mentionnées à l’article 31 du présent décret gouvernemental et ce, dans un délai maximum de trois (3) jours, à compter de la date de prise de ladite décision.

Art. 34 – En cas de survenance d’une erreur matérielle au niveau du système d’information de l’observatoire, la commission peut la corriger d’office ou sur demande de quiconque ayant intérêt.

Art. 35 – Le présent décret gouvernemental entre en vigueur à la date de publication au Journal Officiel de la République Tunisienne. Ne sont pas soustraits de son application les actes et agissements pouvant être qualifiés comme motif d’exclusion commis avant cette date.

Art. 36 – Le ministre de la fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption et le ministre des finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret gouvernemental qui sera publié au Journal Officiel de la République Tunisienne.

Tunis, le 8 avril 2016.

Communiqué : Lancement d'une conception améliorée de la base de données juridiques.

Nous sommes ravis d'annoncer le lancement réussi de notre nouvelle conception de base de données juridiques, dans le cadre de l'engagement continu de DCAF envers nos utilisateurs précieux. Cette mise à jour introduit un ensemble d'améliorations, comprenant une interface rationalisée et conviviale ainsi que des fonctionnalités améliorées, garantissant un accès facile aux informations essentielles.

Nous sommes très fiers de fournir cette amélioration significative et nous réaffirmons notre dévouement à vous offrir un service d'excellence. Nous exprimons notre sincère gratitude pour votre confiance et votre soutien continu.