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III. Autres

Loi n° 2002-52 du 3 juin 2002, relative de l’aide judiciaire

Au nom du peuple,

La chambre des députés ayant adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Chapitre premier – Dispositions générales

Article premier – L’aide judiciaire peut être accordée en matière civile à toute personne physique demanderesse ou défenderesse, et ce, à toute phase de la procédure. Elle peut être octroyée en matière pénale à la partie civile et au demandeur en révision ainsi que dans les délits passibles d’une peine d’emprisonnement au moins égale à trois ans, à condition que le requérant de l’aide judiciaire ne soit pas en état de récidive légale. Les crimes demeurent soumis aux dispositions en vigueur relatives à la réquisition.

L’aide judiciaire peut être accordée pour l’exécution des jugements et l’exercice du droit de recours.

L’aide judiciaire peut également être octroyée dans les affaires criminelles faisant l’objet d’un pourvoi en cassation[1].

Art. 2 – Peut bénéficier de l’aide judiciaire :

̶ la personne morale exerçant une activité à but non lucratif et ayant son siège principal en Tunisie,

̶ l’étranger lorsque les juridictions tunisiennes sont compétentes pour connaître des litiges dont il fait partie, et ce, en application d’une convention de coopération judiciaire en matière d’aide judiciaire conclue avec l’Etat dont il porte la nationalité et sous réserve du respect du principe de réciprocité.

Art. 3 – L’aide judiciaire est accordée à condition que son demandeur prouve ce qui suit :

1- qu’il n’a pas de revenus ou que son revenu annuel certain est limité et ne suffit pas à couvrir les frais de justice et d’exécution sans que ses exigences vitales soient affectées d’une manière substantielle,

2- qu’il apparaît que le droit allégué paraisse être fondé lorsqu’il s’agit d’une demande d’aide judiciaire en matière civile.

Chapitre deuxième – Le bureau d’aide judiciaire

Art. 4 – Un bureau spécialisé dénommé bureau de l’aide judiciaire statue sur les demandes d’aide judiciaire, il a son siège au tribunal de première instance. Il comprend :

¯ le procureur de la République ou son substitut, à titre de président,

¯ un représentant du ministère des finances ou son suppléant désignés par un arrêté du ministre compétent pour une durée d’un an, en qualité de membre,

¯ un avocat ou son suppléant inscrits près de la cour de cassation du même désignés par le ministre de la justice sur proposition du conseil de l’ordre des avocats pour une durée d’un an, en qualité de membre,

¯ un greffier désigné par le procureur de la République parmi l’effectif du tribunal, en qualité de greffier.

En cas d’empêchement de l’un des membres principaux il sera remplacé par son suppléant.

Art. 5 – Les demandes d’aide judiciaire sont présentées directement au président du bureau du tribunal compétent pour statuer sur le litige ou par voie postale par lettre recommandée.

Art. 6 – La demande doit contenir spécialement :

̶ le prénom et nom du requérant, son domicile, sa profession, son état civil ainsi que le numéro de sa carte d’identité ou de son passeport ou de sa carte de séjour pour les étrangers,

̶ un exposé de l’objet de l’action, ainsi que le numéro de l’affaire en instance le cas échéant ou le numéro du jugement rendu.

Doivent être joints à la demande obligatoirement :

̶ une copie des pièces que le demandeur invoque pour établir le droit dont il se prévaut,

̶ les pièces justifiant que le demandeur n’a pas de revenu ou que son revenu annuel certain est limité et ne suffit pas à couvrir les frais de justice ou d’exécution sans affecter d’une manière substantielle ses exigences vitales.

Dans le cas où le requérant se trouve dans l’impossibilité de présenter toutes ou certaines pièces du fait qu’il ne peut pas payer les droits de se les faire délivrer ou les droits d’enregistrement et du timbre fiscal qui leurs sont afférents, il doit le signaler dans la demande.

Art. 7 – Le bureau de l’aide judiciaire tient ses réunions au moins une fois par mois sauf si le nombre des demandes ou leurs causes n’exigent le contraire.

En cas de sa saisine d’une demande d’aide judiciaire relative à une affaire pénale, ou en cours, ou à 1’exercice d’un droit de recours, le bureau doit statuer sur la demande avant l’audience ou avant l’expiration du délai de recours.

Art. 8 – Le bureau de l’aide judiciaire peut procéder à toutes les investigations nécessaires pour s’enquérir sur le revenu réel du demandeur de l’aide.

Les services de l’Etat et toutes les entreprises privées ou personnes physiques concernées doivent mettre à la disposition du bureau de l’aide judiciaire toutes les données et les informations qu’il leur demande afin de l’aider à s’enquérir sur le revenu du demandeur de l’aide judiciaire. Les dispositions de ce paragraphe ne s’appliquent pas aux services fiscaux et de statistique.

Art. 9 – Le président du bureau de l’aide judiciaire peut statuer seul, provisoirement et hors les dates officielles de tenue des audiences du bureau, sur les demandes d’aide d’extrême urgence, et qui ne peuvent attendre la tenue de l’audience périodique du bureau, il s’y prononce dès qu’il en est saisi.

Dans ce cas, le bureau ratifie ultérieurement les décisions de son président ou décide de rétracter l’octroi de l’aide judiciaire si les conditions légales font défaut.

Art. 10 – Le bureau décide d’accorder l’aide judiciaire ou de la refuser, à la lumière d’un rapport élaboré par son président.

Le bureau peut entendre, en matière civile, le demandeur de l’aide judiciaire et les parties adverses. Il peut charger l’un de ses membres de procéder à une tentative de conciliation entre les parties.

Art. 11 – La décision octroyant l’aide judiciaire doit comporter la désignation de son domaine, la nature des frais qu’elle couvre et l’auxiliaire de justice dont le litige exige la désignation après avoir pris l’avis du bénéficiaire de l’aide judiciaire, le cas échéant.

S’il décide l’octroi d’une aide judiciaire partielle, le bureau détermine son taux et énonce, le cas échéant, les noms des auxiliaires de justice désignés.

Art. 12 – Le greffier du bureau de l’aide judiciaire doit, dans tous les cas, notifier au demandeur, directement ou par le moyen d’une lettre recommandée avec accusé de réception, toutes les décisions rendues, et ce, dans un délai ne dépassant pas cinq jours à compter de la date de la décision, une copie de ces décisions est notifiée au président du tribunal saisi du litige, aux auxiliaires de justice nommés par le bureau, et à la trésorerie générale.

Le greffier du tribunal saisi du litige doit mentionner sur le dos du dossier le bénéfice par la partie concernée de l’aide judiciaire partielle ou totale.

Les chefs de greffe des tribunaux doivent transmettre au ministère des finances, dans trois mois de la date du prononcé du jugement, une expédition des jugements dont l’une des parties a bénéficié d’une aide judiciaire totale ou partielle.

Art. 13 – Les décisions rendues par le bureau de l’aide judiciaire ne sont susceptibles d’aucune voie de recours.

La décision de rejet de la demande doit être motivée.

Si le rejet est motivé par le défaut de production des justificatifs du sérieux de la demande, l’intéressé pourra la renouveler dès qu’il aura disposé d’une nouvelle preuve justifiant sa demande.

Le bureau de l’aide judiciaire statue sur toutes les difficultés survenant lors de l’exécution de la décision d’octroi de l’aide judiciaire, à la demande de tout intéressé.

Chapitre troisième – Les frais couverts par l’aide judiciaire

Art. 14 – L’aide judiciaire totale ou partielle, comprend les frais normalement mis à la charge des parties et notamment :

̶ les droits d’enregistrement et le timbre fiscal afférents aux pièces que le requérant présente pour établir ses droits,

̶ les indemnités de retard et les amendes encourues pour non-paiement des droits d’enregistrement et du timbre fiscal dans les délais légaux,

̶ les frais d’expertise et des différentes missions ordonnées par le tribunal,

̶ les frais des actes notariés dont la délivrance est autorisée,

̶ les frais des descentes des juges sur les lieux,

̶ la rémunération de l’avocat désigné,

̶ les frais des citations et des notifications,

̶ les frais des annonces légales,

̶ les frais de traduction, le cas échéant,

̶ les frais d’exécution.

Art. 15 – Un décret fixera le régime spécial relatif à la fixation des honoraires des avocats et de la rémunération des experts désignés en vertu d’une aide judiciaire lorsque ces frais sont mis à la charge du bénéficiaire de cette aide.

Chapitre quatrième – Les effets de l’octroi de l’aide judiciaire

Art. 16 – La décision d’aide judiciaire porte sur les litiges dont la soumission aux juridictions est projetée, aux affaires en cours et à celles qui seront portées devant les juridictions ainsi qu’à l’exercice d’un droit de recours en appel et la réplique réponse à cet appel.

Art. 17 – L’aide judiciaire ne couvre pas les frais d’exercice des autres voies de recours à moins qu’une nouvelle demande ne soit présentée au bureau de l’aide judiciaire compétent et que ce dernier en décide l’octroi.

Art. 18 – Le bénéficiaire de l’aide judiciaire peut continuer à se faire assister de l’avocat ou de l’huissier de justice désigné dans le cas où un appel a été interjeté à condition que le bureau de l’aide judiciaire en soit informé.

Art. 19 – La décision d’aide judiciaire est accordée pour couvrir les frais d’une seule affaire.

Cependant, si la nécessité de protéger le droit ou si les procédures judiciaires requièrent la saisine de plus d’un tribunal ou d’une chambre en même temps, le bureau compétent peut prendre une décision indiquant que l’aide judiciaire octroyée couvre tous les frais engendrés par les affaires engagées.

Le greffier du bureau doit informer, dans ce cas, le président du bureau d’aide judiciaire du tribunal saisi par le litige, de la décision de généraliser cette couverture, afin qu’il procède, le cas échéant, à la désignation des auxiliaires de justice qui relèvent de sa compétence.

Art. 20 – Le bénéficiaire de l’aide judiciaire est dispensé du paiement de l’avance des frais de l’expertise et de la consignation des montants dus à raison de l’exercice du droit de recours, tels que fixés par les textes en vigueur.

Art. 21 – Lorsqu’il a été statué au profit du bénéficiaire de l’aide judiciaire, les dépens légaux qui sont mis à la charge de son adversaire et couverts par l’aide judiciaire sont versés à la trésorerie générale. Le bénéficiaire n’y a aucun droit sur ces dépens.

Dans ce cas, une grosse du jugement est délivrée au receveur des finances compétent afin qu’il procède à l’accomplissement des procédures d’exécution concernant les frais revenant à la trésorerie générale.

Art. 22 – Dans le cas où il a été jugé que les dépens couverts par l’aide judiciaire sont mis à la charge du bénéficiaire, ces dépens sont supportés par le trésor de l’Etat à moins qu’il n’existe un texte spécial dispensant l’Etat de leur paiement.

Le bénéfice de l’aide judiciaire en matière pénale ne dispense pas son demandeur de l’exécution du jugement intervenu à son encontre tant en ce qui concerne les peines sanctions pécuniaires ou corporelles, qu’en ce qui concerne les dommages-intérêts auxquels il a été condamné ou les dépens.

Art. 23 – En cas de jugement d’homologation de la transaction entre les deux parties, l’Etat est subrogé dans les droits du bénéficiaire de l’aide judiciaire en ce qui concerne le recouvrement des dépens qui lui ont été alloués judiciairement et qui sont couverts par l’aide judiciaire.

Art. 24 – Les avocats, les huissiers de justice et autres auxiliaires de justice désignés ne peuvent refuser d’entreprendre les missions dont ils ont été chargés à moins qu’il n’existe un motif valable légalement.

Dans ce cas, l’auxiliaire de justice désigné peut demander qu’il soit déchargé de la mission qui lui a été confiée dans un délai de trois jours à compter de la date de notification de la désignation.

Si le motif invoqué a été établi, le président du bureau de l’aide judiciaire procède à son remplacement.

Art. 25 – Le bureau de l’aide judiciaire peut, d’office ou à la demande de tout intéressé ou du ministère public, rétracter la décision d’octroi de l’aide judiciaire après avoir entendu le bénéficiaire de l’aide, et ce, dans les cas suivants :

̶ Si le bénéficiaire de l’aide vient à avoir des revenus établis certains qui le rendent inéligible au bénéfice de l’aide.

̶ Ou s’il se révèle qu’il ait dissimulé ses revenus, auquel cas, le président du bureau transmet les pièces au ministère public.

L’aide judiciaire totale peut être réduite en une aide partielle si le bénéficiaire vient à avoir des revenus l’y rendant inéligible. Dans ce cas, le bureau doit déterminer le taux de la contribution du trésor dans la couverture des frais dus.

Le greffier du bureau de l’aide judiciaire doit dans tous les cas et dans un délai ne dépassant pas cinq jours de la date de la décision de retrait ou de réduction rendue, en informer la partie concernée directement ou par une lettre recommandée avec un accusé de réception. Il doit, également, en informer le trésor public et les auxiliaires de justice désignés.

Art. 26 – Le trésor public récupère par les voies légales les sommes déboursées pour le compte du bénéficiaire de l’aide judiciaire, chaque fois que le bureau décide le retrait du bénéfice de l’aide judiciaire ou sa réduction.

Lorsque la décision de retrait est fondée sur une amélioration ultérieure des revenus du bénéficiaire de l’aide judiciaire, le trésor public ne récupère parmi les frais engagés, que la partie ultérieure à la date de cette amélioration.

Art. 27 – La décision de retrait ou de réduction de l’aide judiciaire n’a pas d’influence sur le cours de l’instance à laquelle elle se rapporte, ni sur les devoirs professionnels des auxiliaires de justice commis.

Art. 28 – Le bénéficiaire d’une aide judiciaire qui a été retirée doit acquitter la rémunération de l’expert ou de l’avocat selon le régime ordinaire normal de rétribution.

Si, suite à la révision, une aide partielle a été accordée, le paiement s’opère sur la base du régime spécial de rétribution indiqué à l’article 15 de cette loi.

Art. 29 – Il est interdit à tout auxiliaire de justice de recevoir du bénéficiaire d’une aide judiciaire totale aucune somme ou autre à titre de paiement de rémunération et de frais couverts par l’aide judiciaire.

Il lui est interdit également de recevoir de la part du bénéficiaire d’une aide partielle des sommes dépassant la portion de sa contribution à la couverture des rémunérations et des frais, fixée par la décision d’octroi de l’aide.

Art. 30 – La décision d’aide judiciaire est caduque, si l’aide n’a pas été utilisée dans le délai d’un an de la date de notification de la décision du bureau, ou si l’action n’a pas été intentée au cours de ce délai.

Chapitre cinquième – Dispositions pénales

Art. 31 – Est puni d’une peine d’emprisonnement allant de seize jours à six mois et d’une amende de cents dinars à cinq cents dinars ou de l’une de ces deux peines seulement, le requérant de l’aide judiciaire qui s’est sciemment abstenu de révéler ses revenus annuels réels.

Est punie de la même peine, toute personne ayant contribué intentionnellement à la dissimulation des revenus du requérant de l’aide judiciaire dans le but de lui permettre d’obtenir l’aide, sans préjudice de la responsabilité civile qu’elle peut encourir à l’égard de l’Etat.

Art. 32 – Sont abrogées, les dispositions du décret du 13 août 1922, relatif à l’octroi de l’aide judiciaire dans les affaires civiles, tel que modifié le 6 mars 1926, le 13 décembre 1956, le 13 mars 1958 et le 5 août 1959.

La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l’Etat.

Tunis, le 3 juin 2002.


[1] Article premier – Alinéa 3 nouveau – Ajouté par la loi n° 2007-27 du 7 mai 2007.

Type du texte:Loi
Numéro du texte:52
Date du texte:2002-06-03
Ministère/ Organisme:Ministère de la Justice
Statut du texte:en vigueur
N° JORT:46
Date du JORT:2002-06-04
Télécharger le texte:1316 - 1318

Communiqué : Lancement d'une conception améliorée de la base de données juridiques.

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